Le jeu du tiroir : Halo

Pizzas, intelligence artificielle et chants grégoriens ! L’histoire de Halo, l’une des franchises les plus adulées de l’histoire des jeux vidéo, ne manque pas d’anecdotes étonnantes. A l’occasion de la réédition 4K du FPS Halo: Reach, le 3 décembre sur Xbox One et PC, Xbox Wire revient sur l’incroyable success-story bâtie par deux jeunes américains qui débutèrent dans leurs chambres d’étudiants…

Novembre 1997, un immeuble de South Halsted, quartier chaud de Chicago. La lumière pâle des écrans d’ordinateurs, une montagne de cartons de pizzas… C’est dans ces locaux aux airs de grande collocation que s’activent les jeunes créatifs de Bungie, studio de développement créé par Alex Seropian et Jason Jones, 28 et 26 ans. Les deux compères se sont connus à l’université, lors d’un cours sur l’intelligence artificielle. Fans de jeu vidéo, ils développaient des petits programmes dans leur coin, avant de fonder ensemble leur structure. Après six ans d’existence, celle-ci emploie douze personnes et a déjà produit Marathon, jeu de tir à la première personne au scénario plus fouillé que celui de son grand-frère Doom, ainsi que Myth, qui revisite avec audace les règles de la stratégie en temps réel. L’équipe entend reprendre le principe de ce dernier titre pour une toute nouvelle création, assaisonnée cette fois à la sauce science-fiction. Bon nombre d’idées novatrices sont destinées à la nourrir : intégration de véhicules, possibilité pour le joueur d’explorer l’environnement comme il l’entend (pas commun, à l’époque des « jeux couloirs »), rendu terrain réaliste qui n’offre pas l’impression d’évoluer sur un simple plan lisse, ou encore scénario très élaboré, d’une profondeur inédite. Difficile de résumer ce dernier en quelques lignes, disons simplement que le joueur incarnera un cyborg-soldat d’élite devant sauver l’humanité en combattant une redoutable coalition d’aliens baptisée l’Alliance Covenante. Le tout sur un mystérieux anneau-monde (le fameux Halo !), avec le soutien précieux d’une IA baptisée Cortana.

A L’AUBE D’HALO

Lorsqu’ils produisent le premier prototype du jeu, qui répond au nom de code Monkey Nuts, les développeurs optent pour la vue de haut, prisée des jeux de stratégie en temps réel. Problème, l’ensemble manque quelque peu de fun. Après de nouveaux essais, l’équipe décide de changer son fusil d’assaut d’épaule : le titre sera finalement un jeu de tir à la troisième personne, qui mutera plus tard en FPS. Dans le plus grand secret, une première démo est présentée, lors de l’E3 1999, à des journalistes tenus de signer une clause de confidentialité. Ces derniers, conquis, évoquent un hit en puissance, dont ils regrettent de ne pas pouvoir parler. De quoi créer le buzz autour du titre, qui devient la curiosité du salon. La consécration arrivera finalement en juin 2000 : Microsoft, séduit par la première ébauche du futur Halo, rachète Bungie et choisit le jeu pour accompagner le lancement de sa prometteuse console Xbox.

UN ORCHESTRE SYMPHONIQUE

En parallèle du travail des développeurs, le compositeur Martin O’Donnell travaille d’arrache-pied pour concevoir une bande originale qui deviendra l’une des plus célèbres de l’histoire des jeux vidéo. Agrémentée de chants grégoriens destinés à accentuer l’effet dramatique, elle convoque également un orchestre symphonique composé de 60 musiciens. Surtout, elle se révèle audio dynamique, s’adaptant en temps réel à l’action. Le gameplay, quant à lui, apparaît très travaillé, tout comme l’atmosphère et le design, qui offrent une expérience immersive incomparable. La liberté de mouvement du joueur, elle, est inédite. Stuart Moulder, à l’époque General Manager de Microsoft Studios, reviendra sur cette prouesse quelques années plus tard : « Les FPS avaient auparavant pour cadre des tunnels, ce qui engendrait des expériences claustrophobes. Halo, lui, se déroulait à l’extérieur, dans ce paysage extraterrestre, à l’échelle galactique ». Autre trouvaille, un mode multijoueur en ligne très élaboré qui fait du titre le tout premier, sur console, jouable à plus de deux.

SUCCÈS PHÉNOMÉNAL

Au-delà de toutes ces caractéristiques, Halo se démarque des Quake, Unreal et consorts par le charisme de son personnage principal, le Spartan II John-117 connu sous le nom de Master Chief, un super-soldat en armure créé dans le but de protéger les humains. Son doublage français est assuré par David Kruger, voix officielle de l’acteur Dwayne « The Rock » Johnson, et sa palette de mouvements, parmi lesquels des sauts impressionnants et glissades, constitue une innovation supplémentaire à l’époque. Entré au panthéon des héros iconiques de jeux vidéo, il sera le premier à avoir droit à sa statue de cire, au musée Madame Tussauds de Las Vegas.

Sorti le 14 mars 2002 en Europe, au même moment que la première Xbox, Halo se voit finalement rebaptisé Halo: Combat Evolved et rencontre un succès phénoménal, avec près de 6,4 millions d’exemplaires vendus. Un record absolu sur cette console, juste après… Halo 2 et ses 8,5 millions de copies. Suivront 9 jeux et spin-off au total, parmi lesquels Halo: Reach, qui bénéficie, neuf ans après la sortie initiale, d’une réédition programmée le 3 décembre sur PC et Xbox One. Intégrée au bundle Halo: The Master Chief Collection sur le Xbox Game Pass (et disponible également sur le Microsoft Store et Steam), elle proposera de redécouvrir le jeu en version 4K/60fps. De quoi consolider un peu plus la légende d’une franchise qui a inspiré pas moins de 23 nouvelles, romans et comics, ainsi qu’un long métrage au cinéma, une web-série baptisée Halo: Nightfall et produite par Ridley Scott, 7 courts-métrages d’animation japonais… Sans compter l’adoubement par Steven Spielberg en personne qui n’a jamais caché son envie d’adapter le jeu vidéo à la télévision. Qu’il est loin, le temps des petits bureaux de Chicago !