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Échange avec Gareth Coker, compositeur de Ori and the Will of the Wisps

À l’occasion de la sortie d’Ori and the Will of the Wisps, nous avons pu nous entretenir avec Gareth Coker, compositeur de la musique du jeu et de celle de son aîné : Ori and the Blind Forest.

Vous étiez déjà aux commandes de la bande-originale de Ori and the Blind Forest, comment aborde-t-on l’idée d’une suite en tant que compositeur ?

J’ai travaillé exclusivement sur des nouvelles licences jusqu’ici, c’était la première fois que je m’attaquais à une suite et il se trouve que c’était le second opus d’un jeu dont j’avais composé la bande originale… Et, maintenant, je peux le dire, c’est le projet le plus ambitieux, mais aussi le plus difficile sur lequel j’ai travaillé. Comment faire mieux qu’une bande originale déjà très appréciée par la critique ? Et je parle de la musique, mais ça vaut pour l’ensemble de la direction artistique. Plus beau que Blind Forest ? Essayer de créer de meilleures compositions que sur Blind Forest ? Honnêtement, ça nous paraissait impossible. Je pense même que répondre à ces questions demeure la tâche qui a occupé le plus clair de notre temps lors de la pré-production du jeu. Il aurait été trop facile de faire un Ori 1.5, en utilisant les mêmes outils, la même base artistique, le même moteur… Bien sûr, cela aurait pris moins de temps, et la nouvelle itération serait peut-être sortie en 2018, mais nous avons choisi de tout reprendre de zéro, pour faire en sorte que les joueuses et les joueurs aient le sentiment de se retrouver face à une véritable suite.

Comment votre composition s’articule-t-elle autour des thèmes abordés dans le jeu ?

Dès le début du jeu, vous partez à la découverte de l’inconnu et ensuite, vous serez amenés à rencontrer de nouveaux personnages. Il y a une notion de rapport à la différence, à l’étranger, bien plus prononcée que dans le premier épisode. Je devais retranscrire ce sentiment à travers la musique. J’aime voyager et écouter les musiques, qu’elles soient traditionnelles ou non, des différents endroits que je visite. Il y a toujours de nouveaux rythmes, de nouvelles mélodies, des harmonies et surtout des instruments à découvrir. J’ai vécu quelques années au Japon, et cela pouvait se ressentir dans la bande originale du premier opus. Dans cette nouvelle BO, vous pourrez retrouver un instrument d’Amérique du Sud qui en croise un autre venu de Slovaquie, je ne m’impose aucune règle. Ou plutôt si, j’en ai une : je pense que vous avez échoué en tant que compositeur quand on peut remplacer votre création par une autre, sans que l’on ne s’en rende compte. J’ai souvent ce sentiment en regardant des films d’action par exemple, l’impression d’écouter des thèmes qui seraient facilement interchangeables.

On aurait tendance à penser que composer pour le cinéma et le jeu vidéo restent deux exercices assez proches…

La plupart des bandes-originales du cinéma durent entre 60 et 80 min. Pour vous donner une idée, celle d’Ori and the Will of the Wisps dure plus de 3 heures. Donc si l’on compare les deux industries, on se rend compte qu’un compositeur qui travaille pour le jeu vidéo dispose de plus de temps pour s’épanouir, développer ses idées et ses thèmes sur ses compositions. Je ne pourrais pas dire franchement que « oui, nous sommes plus libres dans le jeu vidéo », mais ce qui est sûr, c’est que notre terrain de jeu est bien plus vaste.

En tant que compositeur, à quel point devez-vous travailler main dans la main avec l’équipe chargée du reste de la conception sonore ?

Les bruitages représentent en réalité les percussions de ma bande-originale. Vous vous rendrez compte en l’écoutant que l’on n’y entend presque aucune percussion. C’est parce que les pas d’Ori par exemple, deviennent les percussions. Lorsqu’il utilise son épée, son marteau ou sa lance, on a l’impression que les sons que ces armes émettent font partie de la musique, ils se fondent naturellement avec elle. Bon, je vous ai dit qu’il y avait peu de percussions, mais cette affirmation devient fausse dès que l’on parle des combats contre les boss. Dès lors, la sensation de grandiloquence n’en est que plus forte. L’idée, c’est de créer un spectre qui va du très très doux au très très puissant : cette philosophie créée un effet de contraste nécessaire. Mais pour répondre à votre question, l’idéal pour nous serait que les joueuses et les joueurs ne puissent plus faire la différence entre bruitages et musique. Nous avons en tout cas tenté de créer un ensemble homogène, interdépendant et aux transitions transparentes.

Avez-vous un moment préféré dans Ori and the Will of the Wisps ?

La fin du jeu me fascine, c’est la partie dont je suis le plus fier en tant que compositeur et que j’admire le plus en tant que joueur. Aujourd’hui, quand je rejoue cette séquence, je me dis que même si je le pouvais, je ne changerais rien.

Pouvez-vous en dire autant rétrospectivement en réécoutant les deux bandes originales que vous avez créé pour Ori ?

Je ne suis plus le compositeur que j’étais il y a 5 ans. J’ai évolué professionnellement, mais aussi dans ma vie privée. J’ai vraiment l’impression d’avoir gagné en maturité. Pour tout vous dire, quand j’ai dû entreprendre le premier Ori, je me sentais presque aussi perdu que lui dans sa grande forêt ! Et aujourd’hui, Ori a grandi, le jeu est plus sombre, le studio a grandi, en s’attaquant à une suite bien plus ambitieuse, et j’ai grandi : j’ai le sentiment que cette bande-originale représente la synthèse de tout ce sur quoi j’ai pu travailler depuis le début de ma carrière. S’il devait y avoir un troisième volet d’Ori, je me sentirais sûrement perdu à nouveau et ça m’effraierait, mais je reste fier du travail accompli jusqu’ici.

Ori and the Will of the Wisps est disponible depuis le 11 Mars dans les Xbox Game Pass pour PC et Console, sur Xbox One et PC Windows 10.

En plus du jeu, vous pouvez déjà profiter de la musique du jeu :

Et retrouvez ci-dessous une autre interview menée par la Xbox TV :