Les Français à l’étranger : entretien exclusif avec Jean-Baptiste Olleville, Spécialiste QA chez Ubisoft Montréal

Nous échangeons régulièrement avec ces Français·e·s ayant décidé de travailler dans l’industrie du jeu vidéo, et dont les parcours les ont menés à l’étranger. Après Samy Duc (Respawn Entertainment) et Hélène Cressot (Criterion Games), cette série d’articles exclusifs à découvrir sur le Xbox Wire en français se poursuit avec la rencontre de Jean-Baptiste Olleville, Spécialiste QA chez Ubisoft Montréal. Il nous parle de son parcours, de son métier actuel et de son quotidien au Canada.


Quelle histoire partagez-vous avec le jeu vidéo ?

D’aussi loin que je me souvienne, il y a toujours eu une console chez mes parents. La première qui me vient à l’esprit, c’est la NES, avec le combo Mario Bros. et Duck Hunt. Au fil des années, j’ai possédé plusieurs consoles, mais le vrai tournant a eu lieu au milieu des années 2000, quand j’ai eu mon propre PC et la Xbox 360. J’avais déjà joué à Halo sur PC, puis à Halo 2 chez un ami sur la première Xbox, mais quand j’ai découvert Halo 3, Gears of War et Fable sur Xbox 360, je savais qu’il me fallait la console.

Qu’est-ce qui vous a donné envie d’en faire votre métier ?

Le déclic, c’est la sortie du tout premier Assassin’s Creed, je regardais les tests sur Internet et je me suis dit « Wow, on est capables de faire ça ? Je veux en être, moi aussi je veux travailler sur un jeu de cette envergure ». Après le lycée, je suis entré à ISART Digital, en section Design et Programming, et j’y suis resté jusqu’à obtenir mon diplôme, en 2014.

Comment êtes-vous finalement entré dans l’industrie ?

Pendant mon cursus, j’ai fait un stage chez Gamekult, puis, par la suite, un autre chez Cyanide, en tant que Testeur QA pour Blood Bowl II. Mais je ne suis pas entré à proprement parler dans l’industrie juste après ce stage, j’ai passé plusieurs années sans travailler dans le domaine du jeu vidéo, même si j’ai gardé un pied dedans en écrivant bénévolement pour Xboxygen. Et puis, en 2017, j’ai postulé chez Ubisoft, j’ai passé un entretien et il s’est justement avéré que cette expérience d’écriture a permis à mon profil de se démarquer. Ma capacité à communiquer avec les autres studios a plu à mon manager de l’époque et ça m’a vraiment aidé à entrer chez Ubisoft Paris.

Quand est née l’idée de travailler à l’étranger ?

Je m’étais préparé à cette éventualité, depuis le premier jour où j’ai su que je voulais travailler dans le jeu vidéo. Mais en réalité, ce qui a motivé mon départ à l’étranger, c’était le fait de ne pas trouver de travail. J’avais déposé une demande pour émigrer au Canada avant même d’entrer chez Ubisoft Paris. Quand j’ai reçu une réponse positive, je travaillais déjà dans le studio, mais j’ai pu raccourcir mon contrat pour pouvoir partir à la fin de celui-ci.

Quel poste occupez-vous aujourd’hui chez Ubisoft Montréal ?

Je suis actuellement Spécialiste QA, je suis principalement chargé de m’assurer de la qualité du jeu, j’ai notamment travaillé sur Watch Dogs: Legion et Rainbow Six Mobile. J’aime bien dire que mon rôle auprès de l’équipe est de leur demander comment je peux les aider, pour que l’osmose règne entre les phases de test, d’assurance qualité et les à-côtés.

Le Canada est souvent vu comme un « Eldorado » pour celles et ceux voulant travailler dans cette industrie, partagez-vous ce point de vue ?

C’est vrai qu’il y a une grande concentration de studios au Canada, mais il y a également énormément de professionnels du milieu. Il ne suffit pas de venir au Canada pour trouver un travail dans le jeu vidéo. Personnellement, je n’avais pas spécialement d’attentes, ni de préjugés. J’ai essayé d’être le plus ouvert possible, de ne pas m’imposer, de rester humble et d’apprendre à connaître les gens.

Quelles différences avez-vous pu constater dans le travail au quotidien ?

En premier lieu, le cadre légal est différent : on passe de 35h par semaine à 40 au Canada, et il y a parfois moins de vacances, mais dans le domaine du jeu vidéo, c’est assez généreux. Chez Ubisoft par exemple, c’est six semaines de vacances par année. Au-delà de ça, dans le travail au quotidien, c’est surtout l’horizontalité de la hiérarchie qui m’a marqué. J’ai une plus grande autonomie et le rôle principal de mon manager c’est avant tout de me donner les clés pour me guider. Une autre différence qui me vient à l’esprit, c’est la tendance que l’on a en France à être direct, notamment lorsque l’on fait des retours dans le cadre du travail. Au Canada, j’ai dû travailler sur ça, me montrer plus conciliant dans les échanges avec mes collègues. Changer de pays, ça vous change aussi, on devient une autre personne et c’est une vraie expérience à vivre pour la comprendre, ce que je recommande si l’opportunité se présente.

Quels conseils donneriez-vous à celles et ceux qui souhaitent travailler dans le jeu vidéo ?

Il faut se montrer patient, ça peut prendre du temps d’entrer dans un studio et de véritablement commencer une carrière, même en ayant fait une école et en ayant des diplômes. Et il ne faut pas s’obstiner, rester fixé sur un poste de rêve, il vaut mieux saisir les opportunités lorsqu’elles se présentent. Si vous voulez être game designer, level designer, producer, ou autre chose encore, mais que l’on vous propose un poste de testeur QA, il faut sauter sur l’occasion. Elle vous apportera d’autres choses, notamment une connaissance de la production en interne que vous ne pourrez jamais apprendre à l’école. Rien ne vous empêchera ensuite de continuer à développer vos compétences, de faire vos preuves et d’évoluer vers d’autres opportunités, qui viendront naturellement. Le plus compliqué reste d’entrer dans cette industrie, une fois que ce sera le cas, en travaillant sérieusement, tout sera possible.

Merci à Jean-Baptiste Olleville d’avoir pris le temps de répondre à nos questions. Pour ne pas manquer les prochains article de la série Les Français à l’étranger, restez connectés sur le Xbox Wire en français.