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- Xbox Wire a pu découvrir en exclusivité les premières heures de Keeper, le nouveau jeu signé Double Fine.
- Et il semble qu’il y ait bien plus à découvrir que ce que l’on avait entrevu jusqu’ici, lisez la suite pour en savoir plus.
- Keeper sortira le 17 octobre sur Xbox Series X|S, PC Xbox, Xbox Cloud Gaming (bêta), le Xbox Game Pass et Steam.
Double Fine nous réservait manifestement une surprise de taille. Chaque fois que nous avons vu Keeper depuis son annonce plus tôt cette année, cette aventure psychédélique mettait en avant son héros, un phare ambulant, explorant des paysages surréalistes et résolvant des énigmes aux côtés de Twig, son compagnon ailé. Mais après avoir joué aux premières heures du jeu, j’ai la nette impression que ce n’est là qu’une petite partie de ce qu’il a à offrir, Keeper semble cacher quelque chose d’inattendu.
Mais reprenons depuis le début, car tout cela est nouveau pour nous aussi. Keeper est une aventure narrative qui se distingue par un choix audacieux : personne ne parle (du moins, pas dans une langue humaine) et les seuls textes lisibles apparaissent sous forme de rares indications de commandes à l’écran. Dès ses premières minutes, le jeu s’appuie sur son ambiance et sur l’intuition du joueur.

L’aventure débute alors que Twig et une volée d’oiseaux sont poursuivis par ce que les développeurs appellent The Wither : un essaim menaçant, semblable à des abeilles, composé d’une étrange matière violette. Détourné de sa trajectoire, Twig s’écrase brutalement sur le Phare, déclenchant son faisceau lumineux qui repousse les ténèbres alentour. Beaucoup de jeux commencent par un tutoriel, mais rares sont ceux qui vous font littéralement voir votre héros apprendre à marcher.
Dans une introduction brillante à la philosophie du jeu, apprendre par l’expérience plutôt que par des explications, on découvre que le stick gauche permet au Phare de se pencher. Naturellement, on teste un peu… jusqu’à ce qu’il se brise net à sa base et que, par un procédé laissé à notre imagination, il développe quatre pattes graciles. Dès lors, on se relève et, tel un documentaire animalier sur une girafe nouveau-née, on envoie ce Phare titubant dévaler la colline, tout en apprenant à maîtriser ses nouveaux membres.
Ce tutoriel prend des allures de comédie : alors qu’on peine à garder le contrôle, le Phare s’agite et percute des voitures abandonnées et des maisons délabrées, les réduisant en miettes dans ses efforts maladroits. Peu à peu, il apprend à marcher, puis à courir, et l’aventure s’amorce, avec pour seul objectif implicite une question simple : « Qu’y a-t-il en haut de cette montagne ? »

Et il y a énormément à voir, Keeper déploie un univers saisissant, porté par une direction artistique étonnamment singulière. Des côtes ravagées sont jonchées de squelettes de créatures méconnaissables ; des vallées luxuriantes grouillent d’êtres étranges et bavards ; une montagne voisine peut soudain révéler qu’elle est en réalité une gigantesque créature formée de coquilles d’escargots de la taille d’immeubles, qui se déracine pour avancer à vos côtés. Par endroits, les textures prennent des allures de peinture, on distingue presque les coups de pinceau qui en composent la surface. Le tout est sublimé par un travail somptueux sur la lumière : le soleil se faufile entre les collines pour inonder l’écran d’effets éclatants, tandis que les grottes s’illuminent de champignons bioluminescents qui s’épanouissent à votre passage, projetant d’étranges reflets dans les flaques rocheuses.
Chaque nouvelle zone donne l’impression d’une découverte inédite et cette approche se reflète aussi dans le gameplay. Sur le plan interactif, Keeper repose entièrement sur des énigmes : sans combats ni mort du joueur, la boucle de jeu est construite autour du cycle exploration/puzzle/exploration. Le Phare découvre rapidement qu’il peut utiliser son faisceau pour interagir avec le monde qui l’entoure : les plantes poussent, les créatures réagissent et Twig peut même être dirigé vers certains objets afin de les pousser ou de les tirer pour résoudre des énigmes. Plus tard, le faisceau peut être chargé pour produire des effets plus spectaculaires, comme effrayer des menaces ou dégager des obstacles.
Le jeu repose sur une palette d’aptitudes simple, mais utilisée de manière variée pour proposer des énigmes toujours plus inventives, enseignées au joueur par l’expérience plutôt que par des fenêtres de tutoriel. Très vite, on se retrouve à combiner ces pouvoirs : face à un col de montagne bloqué par un crâne gigantesque, on remarque qu’il est emprisonné par des lianes violettes reliées à une fleur. On utilise alors le faisceau pour la faire éclore, avant d’envoyer Twig se poser sur son pistil ; un mouvement du stick permet de l’arracher. Les lianes se rétractent, la mâchoire du crâne s’ouvre et, comme par magie, un nouveau pont se dévoile.
Mais ces mêmes interactions prennent une toute autre dimension un peu plus tard. À un moment, vous atteignez un village peuplé de petits robots mécaniques qui s’agitent en tous sens, et dont le centre abrite une machine brisée semblant plonger toute la zone dans un flux temporel instable, des ondes d’énergie se propagent, faisant s’écrouler puis se reconstruire les bâtiments autour de vous.
En explorant les lieux, vous découvrez que certaines statues permettent de voyager entre le passé, le présent et le futur grâce à la lumière du Phare, et, détail essentiel, si ce dernier reste inchangé, Twig se transforme : en œuf lorsqu’il est projeté dans le passé… et en autre chose (pas de spoilers !) lorsqu’il voyage dans le futur.
Cette longue énigme vous oblige à tirer parti de ces trois formes. Twig, sous sa forme normale, peut pousser et tirer des objets comme d’habitude, ce qui permet d’activer des mécanismes et de progresser. Twig-œuf, en revanche, fait office de poids massif, utile pour actionner certaines plateformes. À vous donc de manipuler le temps lui-même pour traverser trois temples différents et réparer la machine brisée au cœur du village.
Ce qui impressionne le plus, c’est que tout cela vous est à peine expliqué, il y a presque une logique onirique dans la façon dont les énigmes se résolvent. Chaque nouvelle zone s’ouvre comme une période de pure découverte : on tâtonne, on observe, on expérimente, jusqu’à ce que le chemin à suivre se révèle de lui-même. Le jeu déroule ainsi une succession d’instants de révélation, de petits « aha ! » jubilatoires.
Sans trop en dévoiler, j’ai affronté une météo déchaînée, exploré des profondeurs inquiétantes absentes des bandes-annonces, défié les lois de la gravité et peu à peu construit ma propre interprétation de l’histoire qui se cache derrière tout cela. Le jeu offre un équilibre délicat entre indices disséminés et absence de confirmation définitive, laissant au joueur le soin de se forger sa vision personnelle. Au fil de cette aventure, le Phare et Twig ont tissé un véritable lien, et la personnalité que Double Fine parvient à insuffler à ces deux héros, sans un mot ni la moindre expression faciale, est tout simplement bluffante.
Le message est limpide : Keeper veut constamment renouveler ses énigmes et ses mises en scène. Ce n’est pas un jeu où l’on maîtrise un système, mais un jeu où l’on découvre sans cesse de nouveaux mécanismes, les règles évoluent, les solutions se transforment. Il se dégage de sa conception une sorte d’impatience créative, chaque séquence semblant brûler d’envie de vous dévoiler quelque chose de nouveau.
Keeper sortira le 17 octobre sur Xbox Series X|S, PC Xbox, Xbox Cloud Gaming (bêta), le Xbox Game Pass et Steam.



